PROTEGER L’ENFANCE DES VIOLENCES BASEES SUR LE GENRE : UN DEFI COLLECTIF

PROTEGER L’ENFANCE DES VIOLENCES BASEES SUR LE GENRE : UN DEFI COLLECTIF

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Les enfants, ces êtres d’une fragilité extrême, sont souvent les premiers à subir les violences basées sur le genre, bien avant d’avoir pleinement conscience du monde qui les entoure. Entre 0 et 18 ans, âge légal de la minorité, chaque période de leur vie est marquée par une vulnérabilité particulière, un besoin intense de protection et d’accompagnement. Pourtant, nombreux sont ceux, dès leurs premières années, à vivre des expériences traumatisantes qui déchirent leur innocence. Une fillette de 12 ans arrachée à son école pour être mariée de force, un garçon de 11 ans victime de violences sexuelles dans le secret de sa famille, un enfant de 14 ans rejeté et humilié parce que son identité de genre ne correspond pas aux attentes sociales : autant de blessures invisibles qui compromettent à jamais leur développement physique, psychique et social.

Ces violences, souvent taboues, restent largement ignorées ou minimisées, alors qu’elles brisent les fondements mêmes des droits de l’enfant. Entre stigmatisation, exclusion et souffrance silencieuse, ces jeunes victimes paient un prix exorbitant pour une réalité que la société refuse trop souvent de voir en face. Les conséquences sont dramatiques : perturbation de la scolarité, risques accrus de maladies, troubles psychologiques profonds, voire mise en danger de leur vie.

Face à cette urgence, il est indispensable de replacer l’enfant au cœur des politiques de lutte contre les violences basées sur le genre. Leur âge, leur innocence, leur besoin vital de protection doivent devenir une priorité. Car protéger l’enfance, c’est protéger l’avenir de toute une société. C’est un défi collectif qui requiert une mobilisation sans faille de tous les acteurs, familles, communautés, institutions, gouvernements, pour faire reculer ces violences et garantir enfin à chaque enfant le droit fondamental de grandir à l’abri de la peur et de la violence

Les violences basées sur le genre (VBG) constituent une réalité tragique qui touche de manière alarmante les enfants dans le monde entier. Selon l’UNICEF, près de 1 fille sur 5 dans le monde est mariée avant ses 18 ans, et environ 12 millions de filles sont mariées chaque année avant leurs 18 ans, ce qui les expose à des risques graves pour leur santé, leur sécurité et leur avenir. Parallèlement, la violence sexuelle à l’encontre des garçons reste largement sous-estimée et peu documentée, mais des études estiment que près de 1 garçon sur 13 subit des violences sexuelles avant ses 18 ans.

Les différentes formes de violences basées sur le genre chez les enfants

Le mariage d’enfants est un fléau qui prive des millions de filles de leurs droits fondamentaux. En Afrique subsaharienne, près de 40 % des filles sont mariées avant 18 ans, selon les données de l’UNICEF (2023). Ces mariages précoces mettent en danger leur santé, puisque les complications liées à la grossesse sont la principale cause de mortalité chez les adolescentes de 15 à 19 ans. Ce phénomène interrompt également leur scolarité : 75 % des filles mariées précocement abandonnent l’école, ce qui limite leurs perspectives d’avenir.

Bien que moins documentée, la violence sexuelle envers les garçons est une réalité inquiétante. Une étude menée dans plusieurs pays révèle que près de 8 % à 10 % des garçons subissent des agressions sexuelles avant l’âge de 18 ans. En raison de la stigmatisation sociale et de la peur du rejet, plus de 80 % des garçons victimes ne dénoncent pas ces violences, ce qui les enferme dans le silence et renforce les séquelles psychologiques.

Les enfants dont l’identité ou l’expression de genre diffère des normes sociales sont fréquemment victimes de discrimination et de violences. Selon une enquête menée dans plusieurs pays, plus de 50 % des enfants transgenres ont été harcelés ou agressés en milieu scolaire, et près de 40 % ont fait l’objet de rejet familial. Ces violences ont des impacts directs sur leur santé mentale, avec un taux de dépression et de tentatives de suicide nettement supérieur à la moyenne des enfants.

Le harcèlement basé sur le genre est courant et affecte profondément les enfants. Par exemple, dans une étude menée auprès d’enfants d’âge scolaire, près de 30 % des filles et 20 % des garçons ont rapporté avoir été victimes de harcèlement lié à leur genre. Ce harcèlement engendre un sentiment d’insécurité et d’exclusion, pouvant conduire à l’absentéisme scolaire et à des troubles du comportement.

L’UNICEF estime qu’au moins 1 million d’enfants dans le monde sont victimes d’exploitation sexuelle commerciale, souvent liée à des violences basées sur le genre. Les filles sont les plus touchées, mais un nombre significatif de garçons est également concerné. Ces enfants sont exposés à des risques extrêmes pour leur santé physique et mentale, et leur accès à la justice est souvent entravé.

Ces chiffres illustrent l’ampleur des violences basées sur le genre chez les enfants et rappellent l’urgence d’agir pour mieux les protéger.

Les mécanismes qui perpétuent ces violences

Les violences basées sur le genre chez les enfants ne peuvent être comprises sans analyser les mécanismes sociaux et culturels qui les alimentent. Les stéréotypes de genre profondément ancrés assignent aux filles et aux garçons des rôles rigides, souvent inégalitaires. Les normes patriarcales valorisent la domination masculine, et les traditions peuvent justifier ou banaliser certaines violences. À cela s’ajoutent des facteurs économiques, comme la pauvreté, qui pousse parfois les familles à considérer le mariage précoce ou l’exploitation comme des solutions.

Par ailleurs, le manque de sensibilisation et de formation des acteurs sociaux, parents, enseignants, responsables communautaires, forces de l’ordre, contribue à l’impunité des auteurs et au silence des victimes. Les cadres juridiques, quand ils existent, sont souvent insuffisamment appliqués ou ignorés.

    Face à l’ampleur et à la gravité des violences basées sur le genre qui touchent les enfants, il est impératif que les politiques publiques et les actions de prévention soient spécifiquement conçues pour protéger cette catégorie particulièrement vulnérable. Trop souvent, les stratégies de lutte contre les violences basées sur le genre sont centrées sur les adultes, laissant les enfants en marge, alors même qu’ils subissent des formes spécifiques et souvent plus insidieuses de violences.

    Pourquoi une attention particulière aux enfants est-elle indispensable ?

    Les enfants, notamment ceux âgés de 0 à 18 ans, sont physiquement, émotionnellement et psychologiquement plus fragiles que les adultes. Leur capacité à comprendre, exprimer et se protéger contre les violences est limitée. Les impacts de ces violences sont souvent durables et peuvent compromettre leur développement, leur santé mentale, leur éducation et leur avenir. Par exemple, un enfant victime de violences sexuelles ou d’un mariage précoce peut voir son parcours scolaire interrompu, avec des conséquences sociales et économiques à long terme.

    Les mécanismes de prévention et d’accompagnement doivent être adaptés à l’âge et au contexte des enfants. Cela implique la formation des professionnels de santé, de l’éducation, des forces de l’ordre et des services sociaux à la détection des signes de violences basées sur le genre chez les enfants. Il faut également mettre en place des dispositifs d’écoute, de protection et de réhabilitation qui respectent leur intimité et leur dignité.

    Impliquer les enfants, dans la mesure de leur âge et de leur maturité, est une approche essentielle pour concevoir des programmes réellement efficaces. Leur voix permet de mieux comprendre leurs expériences et besoins réels. Par exemple, des espaces sûrs où les enfants peuvent s’exprimer librement sur leurs difficultés et les violences qu’ils subissent favorisent la mise en place de réponses adaptées.

    Il est crucial que les lois nationales et internationales reconnaissent explicitement les violences basées sur le genre chez les enfants et prévoient des sanctions spécifiques ainsi que des mesures de protection renforcées. La ratification et la mise en œuvre rigoureuse de la Convention relative aux droits de l’enfant (CDE) et de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) sont des leviers importants.

    Les politiques ne peuvent être efficaces sans un engagement fort des communautés. Il faut sensibiliser les familles, les chefs religieux, les autorités locales et les médias pour déconstruire les stéréotypes de genre et dénoncer les violences. Le changement des normes sociales est un processus long, mais essentiel pour que les droits des enfants soient respectés durablement.

    La lutte contre les VBG chez les enfants nécessite des ressources dédiées pour soutenir les programmes de prévention, les services d’accueil, les campagnes de sensibilisation, et la formation des acteurs concernés. Trop souvent, le financement est insuffisant ou dispersé, ce qui affaiblit la capacité d’intervention.

    Placer l’enfant au cœur des politiques de lutte contre les violences basées sur le genre, c’est reconnaître leur vulnérabilité spécifique, leurs droits et leurs besoins propres. C’est aussi garantir qu’aucune forme de violence ne soit tolérée, que les enfants puissent grandir dans un environnement sûr, et que la société tout entière s’engage à protéger sa jeunesse, source d’espoir et de renouveau.

      Malgré l’urgence et l’importance d’agir pour protéger les enfants des violences basées sur le genre (VBG), de nombreux obstacles ralentissent ou empêchent une réponse efficace. Ces défis sont d’ordre culturel, institutionnel, social et économique, et ils contribuent à maintenir un climat d’impunité et de silence autour de ces violences.

      Dans beaucoup de sociétés, les violences basées sur le genre sont normalisées, banalisées, voire justifiées par des traditions, des croyances ou des rôles sociaux stéréotypés. Par exemple, le mariage des enfants est souvent perçu comme une solution à la pauvreté ou un moyen de préserver l’honneur familial. De même, les violences contre les enfants transgenres ou ceux aux expressions de genre non conformes sont souvent ignorées, cachées ou niées, faute d’une reconnaissance sociale. Ce contexte culturel difficile rend la dénonciation des violences particulièrement complexe.

      Beaucoup d’enfants victimes de VBG ne parlent pas de leurs souffrances par peur d’être rejetés, punis, ou même persécutés par leur entourage. La honte, la peur du jugement social et le manque de confiance dans les institutions freinent la révélation des abus. Par ailleurs, les enfants, notamment les plus jeunes, ne disposent pas toujours des moyens ou du langage pour exprimer ce qu’ils vivent.

      Dans de nombreux pays, les mécanismes juridiques et institutionnels ne sont pas suffisamment équipés pour traiter efficacement les cas de VBG chez les enfants. Les procédures judiciaires peuvent être longues, traumatisantes, voire revictimisantes. Le manque de formation des forces de l’ordre, des magistrats et des travailleurs sociaux sur les spécificités des violences envers les enfants aggrave la situation. De plus, la corruption et l’impunité demeurent des obstacles majeurs.

      Les services de protection de l’enfance, les centres d’accueil, les structures de soins psychologiques et les programmes de prévention manquent souvent de moyens humains, financiers et matériels. L’absence d’une coordination efficace entre les différents acteurs,  gouvernement, ONG, communauté internationale, société civile, réduit l’impact des actions entreprises.

      La pauvreté reste un facteur aggravant des violences basées sur le genre. Les familles vulnérables sont plus susceptibles de recourir à des pratiques telles que le mariage précoce ou l’exploitation sexuelle des enfants. De plus, les enfants issus de groupes marginalisés, comme les enfants en situation de handicap, les réfugiés ou ceux vivant dans des zones rurales isolées, sont souvent encore plus exposés aux violences et moins protégés.

      Une meilleure connaissance du phénomène est indispensable pour élaborer des politiques efficaces. Pourtant, les données disponibles sur les VBG chez les enfants sont souvent fragmentaires, incomplètes ou inexistantes, en particulier pour certaines formes de violences ou dans certains pays. Ce manque d’information empêche une évaluation précise de la situation et la planification d’interventions ciblées.

      Ces obstacles sont nombreux et imbriqués, ce qui rend la lutte contre les violences basées sur le genre chez les enfants complexe et exigeante. Pour les surmonter, il est nécessaire d’adopter une approche globale, multisectorielle et inclusive, qui associe tous les acteurs concernés et place la protection de l’enfant au centre des priorités.

        Pour protéger efficacement les enfants des violences basées sur le genre (VBG), il est indispensable de mettre en place des actions coordonnées, ambitieuses et adaptées à leurs besoins spécifiques. Ces pistes d’action doivent s’appuyer sur la prévention, la protection, la prise en charge, mais aussi sur la transformation des normes sociales et le renforcement des capacités des acteurs concernés.

        La sensibilisation est une étape clé pour déconstruire les stéréotypes de genre et faire évoluer les mentalités. Il s’agit d’impliquer tous les acteurs de la société, parents, enseignants, autorités locales, leaders religieux, médias, dans des campagnes ciblées et continues. L’éducation, dès le plus jeune âge, doit intégrer des notions sur l’égalité des genres, le respect des droits des enfants, et la dénonciation des violences. Par exemple, les programmes scolaires peuvent inclure des modules adaptés sur ces thèmes.

        Il est crucial de mettre à disposition des enfants des services accessibles, confidentiels et bien équipés : centres d’accueil, dispositifs d’écoute, soins médicaux et psychologiques spécialisés. Ces structures doivent être présentes non seulement en milieu urbain mais aussi dans les zones rurales et isolées, où l’accès est souvent difficile. La formation des professionnels intervenant auprès des enfants, personnel de santé, éducateurs, forces de l’ordre, doit être renforcée pour une meilleure détection et gestion des cas.

        Les États doivent veiller à ce que leurs lois protègent explicitement les enfants contre toutes les formes de violences basées sur le genre, avec des sanctions effectives et des mesures de réparation. La ratification et la mise en œuvre des conventions internationales relatives aux droits de l’enfant sont indispensables. Par ailleurs, il faut garantir que les procédures judiciaires soient adaptées aux enfants, rapides, et respectueuses de leur dignité.

        Impliquer les enfants dans la prévention et la lutte contre les violences, par exemple à travers des clubs scolaires, des consultations et des espaces d’expression, permet de mieux répondre à leurs besoins et de renforcer leur résilience. Cela contribue également à briser le silence et la stigmatisation.

        Le changement durable passe par un engagement fort des communautés et des familles. Les leaders communautaires, religieux, et traditionnels ont un rôle essentiel à jouer pour promouvoir des normes égalitaires et dénoncer les violences. Des programmes communautaires participatifs peuvent favoriser ce changement.

        Les gouvernements, les organisations internationales et la société civile doivent allouer des ressources suffisantes et pérennes à la lutte contre les VBG chez les enfants. Ce financement doit soutenir aussi bien la prévention, la protection que la prise en charge.

        Un suivi rigoureux et régulier, basé sur des données fiables et détaillées, est nécessaire pour évaluer l’ampleur du phénomène, mesurer l’efficacité des actions et ajuster les politiques. Il faut encourager la recherche et améliorer les systèmes d’information.

        La lutte contre les violences basées sur le genre chez les enfants est un défi majeur qui nécessite une approche globale, intégrée et multisectorielle. En combinant prévention, protection, répression, éducation et mobilisation sociale, il est possible de construire un environnement sûr où chaque enfant pourra s’épanouir dans le respect de ses droits et de sa dignité.

        Les violences basées sur le genre touchant les enfants ne sont pas une fatalité, mais une réalité urgente à combattre avec détermination et humanité. Chaque enfant, qu’il ait 6, 12 ou 16 ans, mérite de grandir à l’abri de la peur, de la honte et de la douleur. Pourtant, trop souvent, ils sont victimes silencieuses d’abus, de discriminations et d’exclusions qui brisent leur innocence et compromettent leur avenir.

        Il est grand temps que les sociétés, les gouvernements, les familles et les communautés reconnaissent cette urgence et s’engagent pleinement à placer les droits et la protection des enfants au cœur des politiques de lutte contre les violences basées sur le genre. Cela implique de déconstruire les normes toxiques, de renforcer les dispositifs d’écoute et de soutien, d’améliorer les cadres législatifs et de mobiliser des ressources dédiées.

        Agir aujourd’hui, c’est préserver la dignité de millions d’enfants et investir dans un futur où l’égalité, le respect et la justice ne seront plus de vains mots, mais des réalités partagées. La protection des enfants face aux violences basées sur le genre est non seulement une obligation légale et morale, mais surtout un acte fondamental d’humanité.

        Ensemble, faisons entendre la voix des enfants, brisons le silence et construisons un monde plus sûr, plus juste, où chaque enfant pourra rêver et grandir librement


        judanguessan35@gmail.com / +225 0757646617

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