RESEAUX SOCIAUX MALVEILLANTS : PRESERVER LES ENFANTS DES CYBERMENACES

RESEAUX SOCIAUX MALVEILLANTS : PRESERVER LES ENFANTS DES CYBERMENACES

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L’univers virtuel est un espace dans lequel les enfants, particulièrement ceux Africains naviguent sans bouée, exposés aux vagues invisibles, mais ravageuses de la cyberviolence. L’essor fulgurant du numérique en Afrique transforme les habitudes, notamment chez les plus jeunes qui sont désormais ultra-connectés, généralement sans surveillance. Selon le site des Nations Unies, un enfant se connecte pour la première fois toutes les demi-secondes. C’est indéniable, Internet regorge d’avantages pour ce jeune public, lui permet d’être informé et de découvrir le monde derrière son écran.

Cependant, cette ouverture au monde virtuel l’expose à de nouvelles menaces, des plus simples aux plus complexes et dévastatrices. Partout dans le monde, 80 % des enfants dans 25 pays affirment se sentir en danger d’abus ou d’exploitation sexuelle en ligne. Or, les mécanismes de protection (législatifs, éducatifs, technologiques) sont encore largement insuffisants. Il est temps de tirer la sonnette d’alarme et d’exiger une cybersécurité adaptée aux mineurs.

Les cyberviolences contre les enfants se définissent comme tous les actes de violence, attaques, commis ou facilités totalement ou partiellement par l’utilisation des réseaux sociaux et des appareils connectés. Susceptibles de revêtir plusieurs formes, elles sont changeantes et peuvent inclure :

  • la profération de menaces sur les réseaux sociaux ;
  • le harcèlement en ligne ;
  • la manipulation ;
  • la cyberintimidation ;
  • la traque ;
  • l’incitation à la violence ;
  • l’incitation au suicide ;
  • la sextorsion ;
  • la violation de la vie privée ;
  • le piratage ;
  • l’abus ;
  • l’exploitation sexuelle ;
  • l’exposition aux contenus sexuels ou violents inadaptés aux enfants…

Certaines violences sont commises à l’égard des enfants, parce qu’ils sont des enfants, tandis que d’autres sont perpétrées envers un public général, mais les enfants y sont plus vulnérables en raison de leur naïveté, de leur sensibilité et parfois de la perte de repères. Leur méconnaissance des dangers numériques, combinée à un accès sans filtre et sans accompagnement, les rend particulièrement fragiles face à des agresseurs souvent invisibles et difficilement traçables.

Face à l’ampleur croissante des cyberviolences qui ciblent les enfants, les dispositifs de protection peinent à suivre le rythme. Sur le continent africain, de nombreux pays ne disposent pas encore de législations spécifiques encadrant la protection des mineurs en ligne. Les lois qui existent sont mal connues, peu appliquées ou inadaptées aux réalités numériques actuelles. Par ailleurs, les autorités judiciaires et policières manquent de moyens techniques et humains pour identifier et poursuivre les cybercriminels, notamment lorsqu’ils agissent au-delà des frontières nationales.

De plus, les mécanismes de signalement sont rarement accessibles aux enfants. Les systèmes éducatifs n’intègrent pas suffisamment l’éducation au numérique ni la sensibilisation aux dangers d’Internet. Quant aux parents, beaucoup se sentent dépassés par les usages technologiques de leurs enfants et ne disposent ni des outils ni des connaissances nécessaires pour les accompagner efficacement. Lorsque l’enfant maîtrise mieux le smartphone et les réseaux sociaux que ses parents, comment peut-on espérer que ces derniers puissent en encadrer l’utilisation ?

De leur côté, les plateformes numériques et les réseaux sociaux, bien qu’informés des risques, ne mettent pas toujours en place des politiques suffisamment strictes pour protéger les mineurs. Il devient donc urgent d’instaurer une cybersécurité pensée pour les enfants, avec des mesures juridiques, éducatives et techniques robustes, adaptées à leur âge et à leur environnement.

Protéger les enfants contre les cyberviolences nécessite une approche multisectorielle, coordonnée et résolument proactive. Il ne suffit pas de réagir aux agressions : il faut les prévenir, les détecter rapidement et garantir une prise en charge adaptée.

Sur le plan juridique, les États africains doivent renforcer et adapter leur arsenal législatif en matière de protection de l’enfance en ligne. De complètes lois explicites sur le cyberharcèlement, l’exploitation sexuelle numérique, la collecte de données des mineurs ou encore la responsabilité des plateformes sont indispensables. Il est également essentiel d’assurer leur mise en œuvre effective par des institutions formées et outillées. Il faut aussi mentionner l’urgence d’actualiser et d’affiner la procédure digitale de traitement des cyberviolences qui se produisent essentiellement sur les réseaux sociaux.

Au niveau éducatif, une sensibilisation des enfants, des parents et des enseignants aux risques du numérique s’imposent. L’éducation au numérique devrait être intégrée dès le primaire, avec des modules sur l’usage responsable d’Internet, la gestion de la vie privée et les réactions à adopter en cas de violences. Des campagnes publiques adaptées aux contextes culturels peuvent aussi contribuer à prévenir et briser le silence autour des cyberviolences.  Au Bénin, la campagne PARE : Protégé, Alerté, Responsabilisé, Éduqué, initiée par l’Agence des Systèmes d’Information et du Numérique (ASIN) représente une bonne illustration. Son objectif est de sensibiliser les internautes, particulièrement les jeunes et les enfants, de l’importance de la sécurité sur Internet et des dangers encourus.

Sur le plan technique, les gouvernements et les fournisseurs d’accès doivent encourager le développement et la généralisation de solutions de contrôle parental et de systèmes de signalement facilement accessibles. Les parents doivent avoir le pouvoir et la capacité de limiter ou d’interdire l’accès de certains sites internet à leurs enfants. Ils doivent aussi imposer des limites de temps de connexion pour réduire la présence des plus jeunes sur les réseaux. La mise en place d’espaces numériques protégés, adaptés aux enfants, serait également bénéfique.

De plus, les gouvernements africains ou les organisations régionales telles que l’Union Africaine peuvent financer la mise en place de systèmes d’alarmes activables dans les messageries privées des réseaux sociaux des plus jeunes. Ces logiciels détecteront les messages suspects, violents, de manipulation ou à caractère sexuel et remonteront l’information à un centre de surveillance qui alertera les parents ou prendra les mesures adaptées pour identifier le danger et préserver l’enfant.

Enfin, les plateformes numériques ont aussi une part de responsabilité : elles doivent renforcer leurs algorithmes de détection, modérer les contenus nuisibles et coopérer plus étroitement avec les autorités locales.

Le soutien affectif et psychologique envers un enfant victime de cyberharcèlement ou de menaces est primordial. Il ne doit pas affronter seul cette situation. Rassurez votre enfant, montrez-lui qu’il n’est pas responsable. Ensuite, signalez les comptes des auteurs de cyberviolences sur les réseaux sociaux et auprès des autorités compétentes de votre pays. Bloquez-les enfin dans les paramètres du réseau social concerné.

Les réseaux sociaux constituent une réalité à double facette pour les enfants : à la fois sources d’opportunités et terrains de dangers. Autant offrent-ils une belle expérience, autant peuvent-ils compliqué la vie ou pousser à la perdre. Si des adultes se suicident à cause du cyberharcèlement, qu’en sera-t-il des enfants qui sont doublement plus fragiles ? La vigilance, la surveillance et le contrôle sont essentiels.


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